Le Mouvement contre le racisme, l'antisémitisme et pour la paix

Un article de WikiMrap.

La création du M.R.A.P.

Le 22 mai 1949, au Cirque d'Hiver, a lieu la « journée nationale contre le racisme, l'antisémitisme, et pour la paix », qui est le congrès fondateur du MRAP.

Plus de 2000 délégués ont participé à cette journée ,acte de naissance du M.R.A.P.. Cent deux sociétés et organisations apportaient leur concours à ces assises enthousiastes, qu'avaient précédées 47 réunions à Paris et 13 en province pour la création de comités locaux. Il y eut deux séances de débat et une séance de clôture présidée par Me André Blumel, élu président du mouvement. Parmi les orateurs qui prirent la parole au cours de la journée: Yves Farge, ancien ministre, président-fondateur du Mouvement de la Paix; le leader catholique Marc Sangnier; Gabriel d'Arboussier président du Rassemblement Démocratique Africain; Alain Le Léap secrétaire général de la C.G.T.; le peintre Marc Chagall; les professeurs Marcel Prenant et Jeanne Lévy; Albert Youdine, Henry Bulawko, Jean de Lorme ainsique Charles Palant, qui allait devenir, l'année suivante, secrétaire général (extrait de Droit et Liberté n°282 de Mai 1969: 20 ans de luttes contre le racisme)

De 1949 à 1966, le M.R.A.P. a organisé chaque année une Journée Nationale, sous la forme d'un grand rassemblement à Paris, dont les participants débattaient de divers aspects de la lutte antiraciste et élisaient la direction du Mouvement. Cette initiative a trouvé son prolongement dans la Journée Internationale pour l'élimination de la discrimination raciale, instaurée par l'O.N.U. qui donne lieu en France, sous l'égide du M.R.A.P., depuis 1967, à une grande diversité de manifestations à Paris et en province.

Les combats du M.R.A.P.

Dés sa fondation, le M.R.A.P s'engage dans les combats qui seront les siens tout au long de son histoire:

  • Combat contre le racisme et pour sa pénalisation. Dans le n°3 de Droit et Liberté (novembre 1949)il publie un appel des juifs de France aux Nations Unies, dans lequel on lit notamment: "Les organisations soussignées demandent que toutes les puissances adhérentes à l'O.N.U. souscrivent dans le plus bref délai une convention internationale dans le cadre de la déclaration internationale du 10 décembre 1948 par laquelle elles prendront l'engagement de s'opposer effectivement sous peine de sanctions pénales à toute propagande antisémite ou de discrimination raciale notamment par voie de presse."
  • Combat contre l'antisémitisme. Le M.R.A.P. dénonce les résurgences de l'antisémitisme dans la presse et la multiplication d'actes racistes
  • Combat pour les droits et la dignité des travailleurs immigrés. Le M.R.A.P. entame dès le n°2 de Droit et Liberté (6 novembre 1949)la publication d'une enquête sur les conditions de vie des travailleurs nord-africains en France et dénonce le racisme et la misère dont ils sont victimes.
  • Combat pour la Paix. De 1950 à 1954, le MRAP joue un rôle important dans la lutte contre le réarmement de l'Allemagne en organisant des manifestations, des rassemblements, des délégations auprès des députés.
  • Dans le cadre de la lutte pour la paix, il participe en 1951 à la vaste campagne de pétitions contre l'arme atomique (Appel de Stockholm). Il est également à l'initiative d'un mouvement en faveur d'un "Pacte des cinq grands pour la Paix"
  • Le M.R.A.P. se mobilise également en soutien aux victimes de procès racistes aux U.S.A. tel Willie Mac Gee en 1950.
  • Le M.R.A.P. est très actif dans le mouvement international pour sauver les époux Rosenberg, accusés aux U.S.A. d'espionnage en faveur de l'U.R.S.S., puis après leur exécution, pour obtenir la révision du procès et leur réhabilitation.
  • Il dénonce, par ailleurs, la politique raciste d'apartheid menée par le gouvernement d'Afrique du Sud


Le numéro 282 de mai 1969 de "Droit et Liberté" résume en 9 articles les principaux sujets qui ont mobilisé les actions M.R.A.P. au cours de ses 20 premières années d'existence:

  • Mille neuf cent quarante neuf: quatre ans après la victoire, l'union des vainqueurs du nazisme a vécu; les alliés sont divisés, les vaincus vont savoir en profiter.
  • Au cœur de l'Europe, une peste mal guérie: moins de 25 ans après la défaite du régime le plus criminel que l'humanité ait enfanté, les héritiers de Hitler se présentent comme un parti de gouvernement
  • Vingt ans de complot: L'extrême droite française, raciste et antisémite, n'a jamais désarmé depuis que l'écrasement de Hitler a entrainé la chute du régime de Pétain, le régime selon ses vœux.
  • Trois millions d'immigrés en France: les travailleurs immigrés sont le sous-prolétariat des temps contemporains. Ils donnent à l'industrie européenne une main-d'œuvre bon marché.
  • La fin des empires coloniaux: des jeunes nations sont nées dans la lutte contre leurs maîtres. Une lutte souvent longue, sanglante, acharnée…
  • Tragédies à l'Est: dans la guerre froide, l'antisémitisme trouve son terrain d'élection; même là où beaucoup le pensaient déraciné à jamais…
  • Le moyen-Orient déchiré: de l'indépendance d'Israël à la guerre des Six jours, un drame qui se prolonge.
  • Les Etats-Unis en proie à leurs névroses: de l'affaire Rosenberg aux luttes du "Black power", vingt ans d'"american way of live".
  • Un crime quotidien: l'apartheid. Aujourd'hui encore, la ségrégation raciale est au cœur d'une idéologie et d'une méthode de gouvernement. Il est vrai que Vorster est un ancien nazi.

La loi contre le racisme

Dès mars 1960, sous l'impulsion de son président Léon Lyon-Caen, le M.R.A.P. soumet au Parlement deux propositions de loi en vue d'une action plus efficace contre le racisme et l'antisémitisme.

En 1972, le M.R.A.P. salue comme une grande victoire le vote de la loi contre le racisme, adoptée à l'unanimité par l'Assemblée Nationale et le Sénat.

Albert Lévy écrit dans "Droit et Liberté" n°313: "Ainsi s'achève sur une victoire pleine et entière, une bataille de treize années. En dépit de quelques péripéties et de quelques modifications mineures, c'est le projet élaboré par la Commission juridique du M.R.A.P., sous la direction du président Lyon-Caen, qui s'inscrit aujourd'hui dans le Droit."


Le MRAP face à la montée du racisme

Entre 1971 et 1979, le MRAP a recensé pas moins de 104 crimes à caractère raciste. En novembre 1971, Djellali Ben Ali est assassiné par le gardien de son immeuble rue de la Goutte-d'Or à Paris.

Le MRAP lancera un appel intitulé : « Le racisme tue en France ». Cette affaire suscite une importante mobilisation, dont celle de Jean-Paul Sartre et Michel Foucault. Le meurtrier, Daniel Pigot, est finalement condamné à deux ans de prison ferme (juin 1977).

Le 28 novembre 1972, Mohammed Diab, 32 ans, est tué au commissariat de Versailles par le sous-brigadier Robert Marquet, qui sera finalement inculpé pour homicide involontaire. Maître Gisèle Halimi, avocate du MRAP, se battra en vain pour que le caractère raciste de l'homicide soit reconnu : la Cour d'appel de Paris prononcera un non-lieu en 1979 !


En juin 1973, le ministre du Travail et des Affaires sociales, M. Gorse, annonce la suppression de la concordance entre permis de travail et titre de séjour. Le ministre annonce également le renforcement du contrôle de l'immigration. La circulaire Fontanet inaugure l'ensemble des lois qui seront prises dans les décennies suivantes pour empêcher l'entrée des immigrés en France. Le MRAP les étudie avec beaucoup d'attention. Maître George Pau-Langevin[1] écrit régulièrement pour le MRAP des articles où elle décortique ces projets et en explique les conséquences.

Fin 1973, 35 000 immigrés ont déposé des demandes de régularisation comme les y incitait la circulaire Fontanet, alors que le solde migratoire était de 105 000 personne en 1972. Pour le MRAP : « Tout se passe comme si l'objectif visé n'était pas fondamentalement le contrôle de l'immigration mais des immigrés, facilitant à moindre frais l'utilisation de cette main-d'oeuvre. »[2]. Dans la revue du MRAP Droit et Liberté, la sociologue Maryse Tripier analyse la place des travailleurs immigrés dans l'emploi en France. 80 % sont embauchés comme ouvriers spécialisés. Les portuguais comptent 70% de travailleurs non qualifiés, les Maghrébins 81,5%, et les Algériens 87%.

Fin août 1973, un déséquilibré mental, Salah Bougrine, blesse mortellement un chauffeur de bus. A la suite d'une campagne de presse très violente[3], sept algériens sont assassinés à Marseille dans les jours qui suivent l'enterrement du chauffeur. Le sud a été particulièrement touché par les exactions racistes de cet été 1973. Le gouvernement algérien suspend officiellement l'émigration car la sécurité de ses ressortissants n'est plus assurée. Le MRAP écrit à l'ambassade d'Algérie pour exprimer sa compréhension.

En janvier 1974, le journal d'extrême droite Minute titre : « Dehors les Algériens ! Ils n'ont plus leur place chez nous après le coup de force des pirates du pétrole. »[4].

En mars 1975, le MRAP élabore un projet de loi contre les expulsions arbitraires. A l'époque, un étranger entré régulièrement sur le territoire français et titulaire d'un titre de séjour peut être expulsé s'il « constitue une menace pour l'ordre ou le crédit public ». Quand une expulsion est prononcée, il faut deux ans avant que le cas soit réexaminé et le cas échéant, que la personne puisse revenir. Malgré certains arrêts du Conseil d'Etat, le sort des étrangers reste entre les mains des autorités politiques. Image:Colloquemrap1.png George Pau-Langevin, Albert Levy, Mouloud Aounit, François Grémy (vers 1989).

Modèle:Référence nécessaire Les travailleurs étrangers feront une grève que la direction de l'entreprise tente de briser en accusant les étrangers de briser l'activité de l'entreprise. Le MRAP et la CGT se porteront partie civile contre l'entreprise.

Modèle:Référence nécessaire les policiers sont confrontés par les déclarations du ministre de l'Intérieur Poniatowski, qui affirme sans aucune preuve dans un bulletin du ministère confidentiel de juillet 1976 que les immigrés sont responsables de plus de crimes que les Français.[5] Le MRAP dénonce ces "statistiques truquées" dans un article de "Droit et Liberté" n°351 de Septembre 1976 et rappelle son argumentaire en dix points qui réfutent ces arguments racistes. Cet argumentaire a été publié dans "Droit et Liberté" n°349 de Juin 1976 p18/19.

Le MRAP alerte l'opinion et organise à Saint-Denis une Semaine de l'immigration.